Carnet de route: Retour sur la commémoration d’Inal 2012

1 décembre 2013

Carnet de route: Retour sur la commémoration d’Inal 2012

Inal, les mauritaniens se souviennent encore. Après deux éditions successives dont j’ai pris part, le voyage vers Inal n’a pas eu lieu cette année.  A la place chacun a tenu à rendre hommage les 27 & 28 dernier aux 28 militaires négro-mauritaniens  pendus à Inal (Nord Mauritanie) sous le régime de l’ancien président, Maouya Ould Taya.  A la place du voyage vers Inal , Le Collectif des Victimes de la Répression(COVIRE) a marqué cette commémoration par la ténue d’une conférence de presse et un meeting vers le carrefour Yoro Sarr.

TPMN

D’autres associations de défense de droit de l’homme ont aussi commémoré ces journées  tristement célèbre. Pour marquer l’évènement, je vous propose mon carnet de route multimédia cette fois- ci sur la commémoration d’Inal 2012 .

INAL

Carnet de route: Retour pèlerinage d’Inal 2012

Comme en 2011, les journées de souvenirs dédiées aux martyrs d’Inal se sont tenues les 27 et 28 novembre 2012 sous la houlette de COVIRE (Le Collectif des Victimes de la Répression). Une dizaine d’organisations de défense de droit de l’homme ont pris part à ce voyage de souvenir pour prendre hommage aux martyrs d’Inal.

Ce voyage organisé pour la deuxième année consécutive a permis l’identification des tombeaux des officiers tués 1990. Des heures d’hommage marquées par le recueillement à la mémoire des martyrs, les témoignages émouvants des rescapés et parents des victimes et les plaidoyers en faveur du règlement définitif de ce passif humanitaire dont dépend la réconciliation nationale selon des défenseurs de droits de l’homme. Pour des parents des victimes: « Il ne sera jamais question de faire table rase du passé tant que les responsables de ces tortures ou exécutions ne sont pas connus et traduits en justice» précisent souvent en larme.

Inal 2

Un recueillement au cours du quel une orpheline s’est évanouie sous le coup de l’émotion lors de la visite funèbre des fosses communes, dirigé par le rescapé Sy Mahamadou sous le regard attentif des éléments de l’escadron d’Inal. Des minutes amères durant lesquelles les victimes jeunes et vieux face à « des hommes en tenue insensibles » peinaient à garder leur sérénité dénonçant « un silence coupable ».

Pour les organisateurs « Inal constitue le paroxysme de l’ignominie ». Même si la lutte peine à donner ses fruits, ils  comptent redoubler d’effort, pour « une identification effective des sépultures afin que leurs proches reposent en paix ». Pour Kane Mamadou, président du Covire.   qui se dit favorable à la visite des 32 sites de tortures  fustige dans ce décor silencieux « les crimes de sang commis, le racisme de l’Etat, les crimes de l’esclavage, de la déportation et de l’exclusion que connaît notre pays ».

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Cette 2e commémoration des journées de souvenirs d’Inal s’est déroulée en présence des membres de la diaspora mauritanienne,  des rescapés comme Sy Mahamadou rescapé dInal , auteur de « L’enfer d’Inal » , Ibrahima Ba rescapé, des enfants et des parents des officiers  tués les 27 et 28 décembre 1990, rendant Inal tristement célèbre.

Après les difficultés d’accès au site Inal, liées  cette année encore au contrôle minutieux du convoi parfois « sans motif  réel » des forces de l’ordre, le convoi mené par une vingtaine de voiture, regagne sa destination sollicitée ce 28 Novembre vers 11h à travers un accueil moins chaleureux des agents de l’escadron de la brigade d’Inal. Une présence marquée par un enregistrement de tous les manifestants et un accès limité au site. Le recueillement s’est tenu en plein air, sous un soleil de plomb et sous le regard curieux des habitants d’Inal.

Pour des militants comme Alassane Dia coordinateur de TPMN les événements d’Inal symbolise « une bêtise, une tentative de génocide » qui ne doit pas rester impuni d’où son appel en faveur « des efforts concrets » pour que la lumière soit faite sur cette « date symbolique, et de recueillement » face au semblant de « règlement du passif ». Une exigence de vérité « pour honorer la mémoire des victimes » à travers l’abrogation de la loi 1993.

Témoignages des militants des droits de l’homme

Maimouna Alpha Sy, Secrétaire Général du Collectif des veuves, tenant son chapelet estime que cette visite des lieux marque une évolution de la gestion du passif car « venir ici était une chose impensable avant, c’est une concrétisation qu’il ya bien eu avancée ». Pour elle, il est temps de gérer ce passif qui prends en otage « la cohésion sociale».

Sall Amadou du collectif REV (1989-1991) est une victime civile dont le père est mort à Zouérate. Ayant perdu son père très jeune, Amadou ainé de sa famille, sans boulot stable, s’active pour arrondir ses fins de mois à travers des cours du soir  afin de combler « le financement médiocre » dont bénéficie son association. Il est certain que  « le dossier traine, l’Etat ne fourni aucun effort » ajoute -il.

D’après Mamadou Lamtoro Camara, membre du collectif des orphelins et victimes civiles et militaires (1986-1991) étudiant en 3e droit public à l’université de Nouakchott : « Il faut que  la Mauritanie puisse regarder son passé en face ». Pour ce dernier qui a effectué le voyage de commémoration de Sorimalé avant celui d’Inal cette année, il est important d’instaurer « les journées de deuil national » afin de perpétuer la mémoire des victimes.

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La représentante de la diaspora en Europe pour cette édition Marieme Kane, par ailleurs présidente de l’Association des Femmes Mauritaniennes du Fleuve (AFMA) vingt ans après les faits  estime que l’heure de la justice a sonné. Cette année une plainte sera lancée dit-elle par la diaspora car pour elle, il est important d’avancer car « sans résultat ce n’est pas la peine de continuer le combat ». En attendant, elle prône l’unité des acteurs confiant qu’il ya « tellement de division nous empêche d’avancer ».

En attendant, pour finir nous vous livrons le témoignage de Ibrahima Ba, Rescapé d’Inal . Entre 1990 -1991, Ibrahima Ba était infirmier dans la garnison d’Inal, au bord des larmes, il confie qu’il a subi plusieurs tortures avant de parvenir à s’échapper avec 500Um en poche en compagnie de Mahamadou Sy .

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A la retraite depuis 2010 Ibrahima Ba témoigne ainsi de ces années sombres : « je ne sais pas si l’état actuel va régler ce problème ou pas, mais  l’Etat  à l’époque était au courant de tout, de toutes les violences qui se pratiquaient, c’est l’Etat qui a fait ça, ils sont responsables. Je ne peux pas oublier ce que j’ai subi durant cette période cauchemardesque, j’envisage même de faire un documentaire sur ça, par devoir de mémoire. Ce qui s’est passé était un acte raciste » conclut-il.

Les organisateurs de ces journées de souvenir exigent  à travers un appel :  la construction à Inal d’un mémorial pour les martyrs, l’adoption des enfants des martyrs comme des pupilles de la nation, l’application du décret d’identification des sépultures, l’annulation de la loi d’amnistie de juin 1993,le  respect des normes et mécanisme de la justice transitionnelle, la mise en place d’une commission indépendante et autonome pour le règlement des violations graves des droits humains, l’indemnisation adéquate des victimes et ayants droits.

Awa Seydou

Archive : « Carnet de route: Pèlerinage à Inal » Mon blog atelier médias

 

 

 

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